Homélie de la Toussaint. L’archevêque Carlo Maria Viganò.
1 Novembre 2024
Marco Tosatti
Chers amis et ennemis de Stilum Curiae, nous vous proposons l’homélie prononcée par Mgr Carlo Maria Viganò à l’occasion de la fête de la Toussaint. Bonne lecture et partage.
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PLACARE, CHRISTE
Homélie pour la fête de la Toussaint
Auferte gentem perfidam
credentium de finibus,
ut unus omnes unicum
ovile nos Pastor regat.
Hymn. Placare Christe servulis
Il y a quelques jours à peine, la divine Liturgie a entonné les louanges du Roi des rois, proclamant la Royauté divine et universelle de Notre Seigneur Jésus-Christ. Aujourd’hui, la Sainte Église célèbre sa Cour céleste : la Tres Sainte Vierge Marie, la Reine ; les neuf Hiérarchies angéliques : Anges, Archanges, Principautés, Puissances, Vertus, Dominations, Trônes, Chérubins et Séraphins ; les Prophètes de l’Ancien Testament ; les Apôtres, les Martyrs, les Confesseurs de la Foi, les Docteurs, les Saintes Vierges, les Moines, les Ermites et toute cette foule immense d’âmes bienheureuses qui peuplent la Jérusalem Céleste, beata pacis visio. L’hymne des Vêpres de cette fête est un cantique à nos compagnons d’armes, aux chevaliers du Verbe Incarné et de la Très Auguste Vierge, aux cœlicoli, aux habitants du Ciel qui jouissent de la vision béatifique en présence de la Très Sainte Trinité. Saint Jean, dans la vision de Patmos, contemple turbam magnam, quam dinumerare nemo poterat (Ap 7, 9), et il est significatif qu’il note qu’il s’agit de personnes ex omni tribu, et lingua, et populo, et natione, de toute tribu, langue, peuple et nation. Une armée innombrable, multiraciale et multiethnique, mais unie par la profession de la même Foi : Tous se tenaient devant le trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches et portant des palmes à la main (ibid.). Les anges, les vieillards et les quatre êtres vivants se prosternent devant le trône de la divine Majesté en disant : Amen ! Louange, gloire, sagesse, action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu pour les siècles des siècles. Amen (Ap 7, 12). Ces paroles rappellent celles que la Sainte Église entonne au cours du Canon de la Messe, quelques instants avant la Consécration : « Saint, Saint, Saint le Seigneur Dieu des armées rangées en ordre de bataille ! Les cieux et la terre sont remplis de ta gloire. Hosanna au plus haut des cieux. » Et avec les yeux de l’esprit, nous voyons toutes les créatures se prosterner devant le Saint des Saints, des purs esprits aux hommes, des animaux aux plantes, dont les perfections sont un rayon des suprêmes perfections de Dieu. Cela nous rappelle le merveilleux Cantique des trois enfants (Dn 3, 52-90) que nous, prêtres, récitons à Laudes :: Benedicite, cæli, Domino… Benedicite aquæ omnes, sol et luna, stellæ cæli, omnis imber et ros, ignis et æstus, rores et pruina, gelu et frigus, glacies et nives, noctes et dies, lux et tenebræ, fulgura et nubes, montes et colles, universa germinantia in terra, fontes, maria et flumina, cete, omnes volucres cæli, omnes bestiæ et pecora… laudate et superexaltate eum in sæcula. À la louange qui monte de la Création, se joignent les fils des hommes, les prêtres du Seigneur, ses serviteurs, les esprits et les âmes des justes, les saints et les humbles de cœur, et les trois jeunes gens qui affrontent sains et saufs les flammes de la fournaise : Benedicite, Ananias, Azaria, Misaël, Domino : laudate et superexaltate eum in saecula : quia eruit nos de inferno, et salvos fecit de manu mortis : et liberavit nos de medio ardentis flammae, et de medio ignis eruit nos ; car I nous a libérés de l’enfer et nous a sauvés de l’emprise de la mort ; Il nous a libérés des flammes ardentes et nous a sauvés du feu.
Cette vision stupéfiante, dans laquelle nous percevons presque la félicité dont jouissent nos compagnons, le Saints, est certainement consolante pour nous qui avons quotidiennement sous les yeux non pas la Civitas Dei, mais la Civitas diaboli. Ici-bas, tout n’est que mensonge, vice, fornication, meurtre, péché, laideur, mort et chaos. Mais que pouvons-nous attendre du monde – dont Satan est le prince – lorsque la Seigneurie de Notre Seigneur Jésus-Christ est niée et blasphémée, et que la societas christiana est trahie et méprisée ; lorsque les nations préfèrent la tyrannie abjecte de Satan au doux joug du Christ Roi et Pontife ?
Les fêtes du Christ Roi et de la Toussaint – ainsi que la commémoration de tous les fidèles défunts de demain – nous rappellent que nous sommes des exsules, citoyens d’une patrie dont nous sommes loin et à laquelle nous devons retourner ; exules filii Hevæ, blessés par le péché originel et rétablis dans la grâce en Marie la Très Sainte, la nouvelle Ève ; in hac lacrimarum valle, qui est une vallée obscure et froide, pleine de douleurs et d’épreuves ; une vallée à travers laquelle nous passons gementes et flentes, considérant ce que nous avons perdu par le péché et regardant avec espérance ce qui nous attend, si seulement nous écoutons la voix de Celui qui nous a aimés au point de s’incarner, de souffrir et de mourir pour notre Rédemption et pour que nous puissions mériter en cette vie de jouir dans l’autre de son triomphe éternel. Je l’ai rappelé dans mon homélie pour la fête du Christ-Roi, en citant les paroles de Notre Seigneur : « Tu le dis, je suis Roi. Je suis né pour cela, et c’est pour cela que je suis venu dans le monde : pour rendre témoignage à la Vérité ; quiconque vient de la vérité entend ma voix » (Jn 18, 37). Celui qui vient de la vérité entend la voix du Christ, parce qu’il reconnaît en Lui son Dieu, Seigneur et Roi, et qu’il Lui reconnaît des droits souverains divins, de lignée et de conquête. Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande (Jn 15,14).
Les Saints que l’Église célèbre et honore sont ses vrais enfants et nos vrais amis. Leur exemple héroïque n’est pas un modèle lointain et inaccessible, mais la preuve que, dans notre néant, nous pouvons nous rendre dociles à l’action de la Grâce et nous enflammer de Charité jusqu’à donner notre vie, affronter la fournaise, souffrir l’exil et l’emprisonnement. Aujourd’hui encore, de nombreux Catholiques meurent ou souffrent pour le Christ ; et dans l’Occident autrefois chrétien, de nombreuses âmes témoignent de leur fidélité jusqu’à être arrêtées parce qu’elles prient en silence devant une clinique pour avortements, parce qu’elles s’opposent à la théorie du genre, parce qu’elles dénoncent les crimes de leurs gouvernements.
Chacun de nous, en ces temps de tribulation, peut être appelé au privilège d’une sainteté à conquérir par le Martyre. Nous ne devons pas penser que ce sont toujours d’autres Catholiques, dans des pays lointains, qui sont placés devant le choix entre l’apostasie et la mort, parce que le temps où la société était bien ordonnée et reconnaissait la Seigneurie du Christ et de sa Loi est révolu. C’est le temps de la préparation et du combat, c’est le temps de l’épreuve et de la persécution avant le retour en gloire de notre Seigneur. Et quand le péché abonde, la grâce abonde.
Le Mystère de la Communion des Saints unit les âmes des élus dans la Charité à leur Créateur, Rédempteur et Sanctificateur, rétablissant l’ordre divin que Satan a brisé. Invoquons nos célestes patrons, et en premier lieu notre Avocate et notre Dame, Regina Crucis : Placare, Christe, servulis, quibus Patris clementiam tuæ ad tribunal gratiæ Patrona Virgo postulat, O Christ, regardez favorablement vos serviteurs, pour lesquels la Vierge leur patronne invoque votre clémence au tribunal de la grâce du Père. Qu’il en soit ainsi.
+ Carlo Maria Viganò, Archevêque
1er Novembre MMXXIV
Omnium Sanctorum
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